Voilà un arrêt bien intéressant rendu la première chambre de la Cour de cassation le 17 juin 2015 (cass.1ere civ., 17 juin 2015, n°13-19.759 : jurisData n° 2015-014968), en matière d’opérations de défiscalisation immobilière soumises à la loi Malraux.
Dans cette décision, la Cour de cassation vient préciser le périmètre de l’obligation de conseil et d’information des intermédiaires (CGP, CIF, commercialisateur, banques et notaire…), dans le cadre du dispositif de défiscalisation loi Malraux, qui permet d‘investir dans un programme immobilier sous le régime des monuments historiques.
La Cour considère, au visa de l’article 1147 du Code civil, qu’il n’est pas établi que les investisseurs avaient été informés que l‘acquisition conseillée comportait un aléa significatif dans la mesure où elle ne leur garantissait pas la bonne fin de l’opération, alors que son succès économique dépendait directement d’une commercialisation rapide, seule à même de permettre une réhabilitation de l’immeuble destiné à être exploité en résidence hôtelière.
Effectivement dans ce type d’opération, le financement des travaux et le succès économique de l’opération dépendent de la commercialisation des biens; en particulier, dès lors qu’aucune garantie extrinsèque d’achèvement n’a été accordée, si la commercialisation des lots se grippe, la réhabilitation de l’ouvrage en sera symétriquement affectée.
Cela peut aboutir à des retards de livraison extrêmement lourds ou tout simplement à l’échec pur et simple de l’opération ; Si « x » lots ne sont pas vendus, c’est toute une partie de l’immeuble qui ne pourra être réhabilitée… L’exploitation commerciale envisagée sur laquelle repose la rentabilité de l’investissement ne pourra jamais débuter.
Les conséquences pour l’investisseur peuvent être catastrophiques, dans la mesure où il peut perdre l’intégralité des sommes investie.
La Cour de cassation, donne dans cet arrêt l’importance qu’elle mérite à l’obligation qui pèse sur les différents intermédiaires d’informer les investisseurs sur ce risque dont la réalisation n’est pas marginale de surcroît.
Il sera donc plus aisé à présent d’engager la responsabilité des CGP, CIF, intermédiaires financiers dans ce type de situation, dès lors que l’aléa susvisé n’aura pas été expressément exposé à l’investisseur.
Autre apport notable de cet arrêt, le notaire se voit mis à sa charge un devoir de « déconseiller » la souscription à un programme dont la faisabilité juridique et financière apparaît incertaine.
Il s’agit d’un accroissement notable du périmètre de l’obligation de conseil et d’information des notaires, qui méritera tout de même confirmation en jurisprudence.