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La caution personne physique peut se prévaloir, à tout moment, de la disproportion de son engagement

3 octobre 2019   |   2 min de lecture

Droit des contrats. Après la mise en liquidation judiciaire d’une société, son dirigeant a fait valoir que son engagement était disproportionné.

Dans cette affaire, une banque avait consenti des prêts à une société, crédits cautionnés par le dirigeant de celle-ci. Après la mise en liquidation judiciaire de la société, la banque a demandé au dirigeant d’exécuter son engagement.

Celui-ci s’est alors opposé à cette demande en faisant valoir que son engagement était disproportionné par rapport à ses biens et revenus.

Face au refus du dirigeant, la banque a répliqué en soutenant que la prétention de la caution tendant à obtenir la nullité du cautionnement était prescrite.

Suivant jugement du 9 novembre 2015, le Tribunal de commerce de Versailles a fait droit aux demandes de la banque.

Toutefois, ce jugement n’ayant pas été signifié dans le délai de l’article 478 du code de procédure civile, le Crédit agricole a de nouveau assigné M. Y, par acte du 10 janvier 2017, devant le tribunal de commerce de Versailles, lequel par jugement du 7 février 2018, a débouté le Crédit agricole de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné à payer à M. Y la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

« Le tribunal a considéré que les engagements de caution de M. Y étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus. »

Le tribunal a considéré que les engagements de caution de M. Y étaient manifestement disproportionnés à ses biens et revenus. Le Crédit agricole a interjeté appel de cette décision.

Dans l’arrêt ici commenté, les juges du second degré rappellent, sans ambiguïté, que la sanction du caractère manifestement disproportionné de l’engagement de caution consenti par une personne physique est, pour le créancier professionnel, l’impossibilité de s’en prévaloir… Et non sa nullité.

Ils jugent, en conséquence, qu’ils peuvent se prononcer sur la disproportion de l’engagement du dirigeant sans avoir à examiner la prescription de la demande en nullité puisque cette sanction n’est pas encourue et que la caution peut invoquer la disproportion de son engagement à chaque instant.

L’impossibilité pour le créancier de se prévaloir d’un cautionnement manifestement disproportionné constitue une défense au fond qui échappe à la prescription (Cass. 1e civ. 31-1-2018 n° 16-24.092 FS-PB : RJDA 7/18 n° 603).

La décision commentée rappelle également que la sanction de la disproportion ne peut être que l’inopposabilité de l’engagement de caution. En conséquence, si l’action est accueillie, la caution est totalement déchargée de son engagement (Cass. com. 28-3-2018 n° 16-25.651 : RJDA 7/18 n° 604 ; Voir aussi : CA Riom, 21 novembre 2018, n°17/00623) et la caution qui agit sur ce fondement ne peut demander qu’une décharge et non des dommages-intérêts (Cass. com. 8-4-2015 n° 13-26.734 F-D : RJDA 12/15 n° 867).

À rapprocher : Cass. com., 17 octobre 2018, n°17-21.857 ; Cass. com., 6 juin 2018, n°16-26.182 ; Cass. com., 28 mars 2018, n°16-25.651 ; Cass. com., 15 janvier 2015, n°13-23.489